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Se faire du pied… Sans se marcher sur les pieds : convergence entre test et accessibilité

Dans notre environnement de travail, nous avons la chance de pouvoir réunir sur nos projets des expertises complémentaires, trop souvent mises de côtés dans les contextes tendus, faute de temps ou de budget. C’est notamment le cas des tests et de l’accessibilité, encore trop fréquemment relégués au second plan alors qu’ils conditionnent directement la qualité, dont la robustesse et la durabilité des produits.
Une fois réunis sur un même projet, nous avons rapidement constaté que nos métiers partageaient de nombreux points communs. Une grande partie du travail d’un expert en accessibilité consiste à réaliser des tests de conformité, tandis que, pour l’équipe test… c’est littéralement le cœur de son métier de devoir vérifier la présence d’un élément.
Nous avons donc commencé à nous faire du pied, avant de nous interroger sur nos périmètres respectifs et sur la meilleure manière de travailler ensemble sans se marcher dessus.

Tests et audits d’accessibilité : deux approches complémentaires

Dans les projets dont l’objectif est de rendre les services accessibles, il existe souvent une confusion entre les tests d’accessibilité et les audits d’accessibilité. Ces deux démarches ont pourtant des objectifs distincts.

Test d’accessibilité, vérifier par petit pas l’utilisabilité pour tous

Les tests d’accessibilité accompagnent le développement d’une application pour garantir qu’elle reste utilisable par toutes et tous.
Les Quality Analysts (QA) les mettent en place manuellement ou automatiquement, les exécutent, puis assurent le suivi des correctifs si nécessaire, comme ils le feraient pour une anomalie d’ergonomie, un problème fonctionnel ou une erreur de calcul.
Ces tests permettent d’identifier, au fil de l’eau, les problèmes d’accessibilité détectables automatiquement ou testables sans expertise avancée. Une partie de ces tests repose sur les « Easy Checks », une série de vérifications simples qui assurent les bases de l’accessibilité : navigation au clavier, alternatives textuelles des images, hiérarchie des titres, cohérence des formulaires, etc.
Il existe des extensions navigateur et des outils permettant de détecter facilement les manques de conformité d’un site ou d’une application en matière d’accessibilité. L’équipe QA peut notamment s’appuyer sur :

  • «WCAG Color Contrast Checker» qui va permettre de vérifier que le contraste est suffisant et si non mettre en évidence ou cela doit être corrigé.
  • Une autre extension intéressante, «Assistant RGAA» qui liste les catégories (Image, Lien, Multimédia…) et les critères du Référentiel Général d’Amélioration de l’Accessibilité (RGAA). Elle donne entre autres les instructions pour tester et permet de mettre le critère sélectionné en Conforme, Non conforme…

Audit d’accessibilité, évaluer la conformité d’un produit

L’audit d’accessibilité, quant à lui, est une évaluation complète et structurée d’un site, d’une application ou d’un service numérique. Il vise à vérifier sa conformité vis-à-vis des normes d’accessibilité. En France, on utilise le RGAA, fondé sur les Web Content Accessibility Guidelines (WCAG).
Un audit RGAA consiste à analyser un échantillon représentatif de pages ou d’écrans pour vérifier le respect de 106 critères de contrôle, couvrant 13 thématiques : images, cadres, couleurs, multimédia, tableaux, liens, scripts, éléments obligatoires, structuration, présentation, formulaires, navigation et consultation.Chaque critère comprend en moyenne 2 à 3 tests. On estime que seulement 20 à 30% d’entre eux peuvent être automatisés. Bien que certains soient simples à exécuter, l’ensemble de la démarche demande une expertise spécifique et du temps.
Les audits sont donc longs à réaliser et mobilisent des ressources peu disponibles, surtout dans le contexte post European Accessibility Act. On ne peut généralement pas en mener plusieurs par projet.

Qui fait quoi ?

Réaliser des tests ou un audit uniquement en fin de projet n’est pas la bonne approche : les erreurs sont déjà présentes et souvent accumulées. Les corriger à ce stade devient coûteux et chronophage. Ainsi, il est pertinent de les exécuter tout au long du projet, ce qui permet de détecter les erreurs au plus tôt et d’éviter l’effet « boule de neige » des anomalies répétées.
C’est un peu comme dans le bâtiment : s’occuper de l’accessibilité une fois la construction terminée implique de casser des portes, d’ajouter des rampes ou des ascenseurs oubliés.
Une approche plus efficace consiste à intégrer les bonnes pratiques dès le début du projet — c’est ce qu’on appelle l’approche « Shift Left », qui vise à détecter et corriger les problèmes le plus tôt possible.
Un autre point essentiel : l’accessibilité est l’affaire de tous.
La vérifier dès les premières étapes du projet permet d’embarquer l’ensemble des équipes et d’ancrer durablement les bons réflexes.
Accompagnée par les experts accessibilité, l’équipe test intègre les tests d’accessibilité dans son panel habituel.
De son côté, l’équipe accessibilité réalise des audits intermédiaires pour identifier les problèmes non couverts par les tests classiques, puis un audit final en fin de projet.

Les bénéfices

Cette collaboration crée une véritable dynamique vertueuse :

  • Les deux équipes s’enrichissent mutuellement.
  • La culture du test apportée par l’équipe QA a permis aux experts accessibilité de gagner en efficacité, notamment sur l’automatisation.
  • L’équipe accessibilité, quant à elle, a permis aux QA de monter en compétence sur les enjeux d’accessibilité numérique. C’est une approche gagnant-gagnant, qui se traduit par :
  • Moins d’anomalies détectées en fin de projet ;
  • Une meilleure qualité globale du produit (performance, ergonomie, robustesse) ;
  • Une culture commune autour de l’accessibilité numérique ;
  • Et une économie de temps et de moyens à long terme.

En définitive, cette collaboration entre QA et experts accessibilité constitue une première étape indispensable. Elle pose les fondations d’un produit plus inclusif, mais ne garantit pas à elle seule une expérience réellement accessible. La conformité, aussi importante soit-elle, ne reflète qu’une partie de la réalité vécue par les utilisateurs.
C’est un peu comme dans le bâtiment : le fait d’avoir posé le plancher ne signifie pas que la maison est habitable.
De la même manière, atteindre la conformité ne garantit pas une accessibilité complète. L’enjeu va au-delà du respect des critères : il s’agit de comprendre les usages, de tester en conditions réelles en s’appuyant sur un panel représentatif, d’anticiper les besoins, et d’inscrire durablement l’accessibilité dans la culture du projet. C’est là que commence la véritable démarche d’amélioration continue.

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