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Recrutement des développeurs en Afrique : l’incohérence d’un système qui veut innover avec des méthodes archaïques

Le secteur technologique africain connaît une croissance rapide, avec une génération de développeurs talentueux, créatifs et exposés aux outils les plus modernes. Pourtant, un paradoxe persiste : les pratiques de recrutement restent ancrées dans des approches obsolètes qui ne reflètent ni la réalité du métier ni les exigences de l’innovation.

1. Un héritage de méthodes scolaires mal adaptées au numérique

Dans de nombreux pays africains, et particulièrement au Cameroun, les entreprises recrutent encore les développeurs comme on recruterait des enseignants d’histoire.
Les tests sont centrés sur la mémoire :

  • citer le nom exact d’une méthode standard,
  • écrire la syntaxe d’un commentaire multi-ligne,
  • se souvenir de la fonction qui retourne le dernier élément d’un tableau,
  • recopier du code sur papier.

Mais un développeur moderne ne travaille plus ainsi.
Les éditeurs de code signalent les erreurs, l’autocomplétion accélère la syntaxe, la documentation est accessible en un clic, et l’essentiel du travail repose sur la capacité à comprendre, analyser, modéliser et résoudre des problèmes.

Évaluer un développeur sur sa mémoire dans un monde où les outils compensent justement la mémoire est une incohérence fondamentale.

2. Des entreprises “innovantes” qui n’innovent pas dans leurs pratiques internes

Nombre d’entreprises se revendiquent “innovantes”, mais continuent de recruter selon des normes dépassées.
Résultat :

  • elles attirent les candidats capables de restituer un cours,
  • mais passent à côté de ceux capables de construire un produit,
  • elles évaluent la mémoire, mais pas la logique,
  • elles mesurent la récitation, mais pas la capacité d’apprentissage.

C’est ainsi qu’on retrouve des organisations « tech » qui, paradoxalement, peinent à produire des produits réellement innovants : on ne peut pas bâtir l’avenir avec des processus hérités du passé.

3. Les compétences réellement utiles aujourd’hui

Le développement moderne repose sur trois piliers :

Analyse et structuration

Un bon développeur comprend un problème métier, identifie les contraintes, propose une solution modélisée et cohérente. Cette compétence prime sur la capacité à réciter des méthodes.

Capacité à faire des recherches

Un professionnel performant sait chercher, comparer, documenter, tester et valider rapidement des solutions. La valeur du développeur en 2025 réside dans sa vitesse d’apprentissage, pas dans sa capacité de mémorisation.

Maîtrise d’outils modernes

L’environnement technologique actuel — GitHub Copilot, ChatGPT, frameworks avancés, IDE intelligents — impose une autre manière de travailler : plus productive, plus collaborative, plus outillée.

Recruter sans évaluer ces dimensions, c’est recruter à l’aveugle.

4. Pourquoi ces méthodes doivent disparaître

L’ère de l’IA et de l’automatisation redéfinit le métier de développeur.
Demander de la récitation alors que les outils complètent, corrigent et proposent du code est une perte de temps pour tous.

Ces pratiques archaïques :

  • découragent les candidats compétents,
  • créent des recrutements biaisés,
  • ne permettent pas d’identifier des profils réellement productifs,
  • ralentissent l’innovation.

L’enjeu est clair : adapter le recrutement aux standards internationaux modernes pour ne pas rester à la traîne.

5. Vers un modèle de recrutement moderne et adapté au contexte africain

Pour évaluer efficacement un développeur aujourd’hui, les entreprises devraient privilégier :

  • Des tests pratiques courts, réalisés dans un environnement réel (IDE, Git, frameworks).
  • Des scénarios orientés produit : ajouter une fonctionnalité, corriger un bug, améliorer une API.
  • Des évaluations de raisonnement : comprendre comment le candidat aborde un problème.
  • Des entretiens techniques structurés mais basés sur l’expérience réelle, pas la récitation.
  • Des discussions de code déjà écrit, pour analyser la logique, la lisibilité et la capacité de structuration.

Ces approches reflètent la réalité du travail quotidien d’un développeur et permettent d’identifier ceux capables d’apporter une valeur réelle.


Conclusion

Le Cameroun et l’Afrique disposent d’un vivier immense de talents.
Mais tant que les entreprises utiliseront des méthodes de recrutement d’un autre âge, elles continueront à embaucher des profils « scolaires » plutôt que des créateurs d’innovation.

Dans un monde dominé par l’IA, la compétitivité dépend de la capacité à recruter des personnes capables de penser, analyser, collaborer et construire — et non de réciter.

Réinventer le recrutement, c’est la première étape pour réellement innover.

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